Thomas Östros, vice-président de la BEI, a prononcé le discours d’ouverture de la conférence Climate & Development Finance: What Works?, une manifestation organisée conjointement par la BEI et Project Syndicate.

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  Plus d’informations sur la participation de la BEI à la 78e session de l’AGNU


Seul le discours prononcé fait foi.


 

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Mesdames et Messieurs, je vous souhaite la plus cordiale bienvenue, que vous soyez présents ici, parmi nous, à New York ou en ligne.

Je dois dire que le titre de l’événement d’aujourd’hui – Ce qui fonctionne – me plaît beaucoup. Il traduit bien la raison fondamentale de notre présence ici cette semaine. À savoir : trouver ensemble des solutions aux défis que nous rencontrons.

Nous n’avons pas besoin de nous convaincre les uns les autres qu’il est urgent d’agir pour le climat et que le développement à l’échelle planétaire en dépend.

En revanche, il est clair que nous devons insuffler une nouvelle dynamique en faveur de l’intérêt économique que présente l’action climatique mondiale.

Des économistes comme Vera Songwe (dont je salue la présence parmi nous aujourd’hui), Nicholas Stern et Amar Bhattacharya estiment que les pays en développement ont besoin d’au moins 350 milliards de dollars supplémentaires de financements annuels à faible coût pour renforcer leur résilience climatique et protéger leurs systèmes de santé contre les pandémies.

Nous ne comblerons ce déficit qu’en transformant les « besoins » en « argumentaires d’investissement ». Je suis convaincu que l’action climatique est le grand accélérateur de croissance pour les pays en développement pour les années à venir… et une importante source de résilience pour les plus vulnérables.

Décarbonation n’est PAS synonyme de désindustrialisation, bien au contraire.

Décarbonation rime avec innovation, technologie, croissance et développement, ainsi que stabilité et prospérité pour les générations futures.

Nous devons reproduire à grande échelle les modèles qui fonctionnent aujourd’hui et redoubler d’ingéniosité pour trouver de nouvelles solutions qui peuvent être développées rapidement.

Les finances publiques et les banques multilatérales de développement ont un rôle central à jouer. Elles doivent :

  • assumer les risques que le secteur privé n’est pas disposé à prendre, 
  • s’orienter vers des secteurs où la rentabilité économique est encore incertaine, et
  • mettre sur le marché ce que nous appelons le capital « patient ».

L’initiative Bridgetown, soutenue par la Première ministre de la Barbade, Mia Mottley, et le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, nous pousse à réformer de toute urgence l’architecture financière internationale, afin de répondre aux besoins de développement des pays du Sud.

Les institutions financières internationales et les banques multilatérales de développement comme la Banque européenne d’investissement doivent assumer leur rôle. 

Notre rôle est de tirer parti de chaque centime que nos actionnaires nous donnent en attirant les investissements privés vers des projets qui réduisent les émissions et améliorent la résilience des pays – non seulement face aux changements climatiques, mais aussi à d’autres crises, comme les pandémies.

Permettez-moi de souligner que nous devons aller bien au-delà des solutions de facilité. Nous devons appuyer massivement les technologies innovantes et véritablement transformatrices pour décarboner, par exemple, les secteurs dont l’empreinte carbone est difficile à réduire, tels que l’acier et le béton. C’est là que nous avons vraiment besoin de solutions de pointe.

Nous pouvons – et devons – nous attaquer de front aux enjeux et gagner la lutte contre les changements climatiques, sans la peur qui pourrait nous paralyser, mais en comptant sur les opportunités qui font battre nos cœurs.

 

Je sais que derrière chaque projet climatique – en particulier en matière d’adaptation – se cachent des heures de travail pour qu’il soit bancable et qu’il produise l’impact attendu.

L’écoute attentive de nos partenaires contribuera à répondre à la demande légitime du monde en développement en matière d’outils qui permettent de résoudre la quadrature du cercle :

  • entre les ressources disponibles et le manque de capacité technique pour mettre en œuvre des projets,
  • entre les besoins massifs d’investissement et la viabilité de la dette, et
  • entre investissement et grande vulnérabilité aux catastrophes.

Pour relever ces défis, à la BEI, nous avons récemment convenu de prolonger la durée de nos prêts souverains jusqu’à 30 ans, avec un différé de remboursement pouvant aller jusqu’à 10 ans. Nous avons renforcé notre présence mondiale pour mieux écouter et pour partager nos compétences techniques. Ainsi que pour donner vie à d’autres idées, telles que les échanges « dette contre nature » et « dette contre climat », et inclure des clauses de résilience climatique dans nos contrats de financement.

 

L’Europe se réveille, je pense. Mais nous sommes encore trop lents : un café bien serré s’impose.

Notre réveil collectif, le 24 février 2022, a été plutôt traumatisant avec l’agression russe en Ukraine.

Notre dépendance à l’égard du gaz russe a également été au détriment des incitations du marché pour une transition vers les énergies renouvelables. Nous en avons tiré une leçon amère : investir dans les combustibles fossiles est tout simplement une mauvaise idée, même financièrement parlant.

En 2019, à la BEI, nous avons décidé de cesser progressivement de financer des projets énergétiques recourant aux combustibles fossiles sans dispositifs d’atténuation, y compris le gaz naturel.

En 2020, nous nous sommes engagés à consacrer au moins la moitié de nos financements à l’action pour le climat et à la durabilité environnementale d’ici 2025, ce qui permettra de mobiliser 1 000 milliards d’euros d’investissements verts d’ici 2030.

Nous sommes en passe de tenir cet engagement – pour ce qui est des volumes financiers, mais aussi en matière d’impact et de priorité de nos projets : axés sur la technologie, ils soutiennent la transition écologique.  

 

Notre réveil nous a finalement incités à établir et à nourrir davantage de partenariats sur un pied d’égalité dans le monde entier, en s’appuyant sur une action climatique innovante, sur un engagement fort en faveur de l’adaptation et sur la création de passerelles d’investissement avec le monde.

Les arguments en faveur de l’action pour le climat sont plus forts que jamais.

Sur ces paroles, je vous souhaite une belle matinée.

Merci.