De nombreux foyers irlandais se chauffent au charbon, un combustible polluant. Grâce au programme ELENA, le comté de Tipperary se dote de logements économes en énergie et propres.
En hiver, les journées d’Aileen Mc Carthy commençaient par une routine des plus pénibles.
À son réveil, dans sa froide maison irlandaise, elle s’en allait tout d'abord ramasser les cendres de charbon brûlées dans la cheminée. Ensuite, elle passait l’aspirateur dans toutes les pièces de la maison pour enlever la poussière de charbon. Le rituel suivant consistait à allumer un nouveau feu de charbon, puis à s'asseoir pour se brancher, pour l’essentiel de la journée, un masque à oxygène qui l'aidait à respirer.
« Oh, mon Dieu, je ne peux pas vous décrire à quoi ressemblait notre vie ! », confie John McCarthy, 59 ans, habitant du village de Cullen, au milieu du comté de Tipperary, en Irlande. « Les cendres et les fumées étaient un problème permanent. L’air était toujours saturé de poussière et provoquait chez moi des infections pulmonaires. »
Faire place aux énergies nouvelles
Aujourd’hui, la vie d’Aileen McCarthy a changé et son état de santé s’est amélioré depuis qu’un programme énergétique mis en place par le comté lui a permis de se débarrasser de sa cheminée au charbon et de rénover toute sa maison. Les pièces de sa maison sont maintenant exemptes de poussière, elle peut en faire le tour sans se mettre à tousser et n'a plus autant d’infections. « Je ne me reconnais plus », dit Aileen, atteinte d'une maladie respiratoire qui l’a privée de 80 % de sa capacité pulmonaire.
Il y a beaucoup de cas comme celui des McCarthy pour lesquels une solution a été trouvée, explique Louise White, experte en efficacité énergétique à la Banque européenne d’investissement.
« Les programmes énergétiques comme celui-ci peuvent faire plus que simplement permettre de réduire la facture énergétique. Ils peuvent aussi réellement améliorer les conditions de vie des personnes », poursuit Louise White, qui participe à la gestion du programme ELENA, le mécanisme européen d'assistance technique pour les projets énergétiques locaux destiné à soutenir la préparation de projets relatifs à l’efficacité énergétique partout en Europe.
En Irlande, une aide non remboursable de 1,5 million d’EUR au titre d’ELENA soutient l’Agence pour l'énergie du comté de Tipperary dans la préparation d’audits énergétiques et d’études de faisabilité qui conduiront à la mise en œuvre de centaines de mesures de rénovation relatives aux énergies renouvelables chez des particuliers. Grâce à cette opération d’aide non remboursable, signée en juillet dernier, le comté de Tipperary va pouvoir isoler des maisons et remplacer des systèmes de chauffage à combustibles solides polluants par des pompes à chaleur modernes fonctionnant à l’électricité. La subvention accordée permettra également d'installer un éclairage public à faible consommation d'énergie et de mettre en œuvre des programmes d’efficacité énergétique dans des bâtiments publics et des petites entreprises.
Des projets susceptibles d’en inspirer d'autre
La BEI espère que des projets énergétiques similaires seront lancés partout en Irlande. L’un des principaux objectifs est de renforcer les connaissances à l’échelle locale et d’utiliser ensuite ces nouvelles compétences pour reproduire des projets ailleurs. Un programme mis en place en région Picardie, dans le nord de la France, qui, grâce à une subvention au titre d’ELENA, appuie la rénovation de milliers de logements, constitue ainsi un modèle à « interlocuteur unique » dont d'autres régions pourraient s’inspirer. À Ljubljana, en Slovénie, des responsables locaux ont fait appel à ELENA pour mener à bien des rénovations énergétiques de grande envergure, et les autorités publiques ont publié des lignes directrices pour montrer à d'autres villes comment transposer ce programme d’efficacité énergétique.
ELENA prend de l’ampleur. Outre les autres projets énergétiques soutenus, la Commission européenne a décidé l’an dernier d’allouer 94 millions d’EUR à ELENA pour étendre les mesures d’efficacité énergétique au secteur du logement en Europe. La BEI gère le programme ELENA pour le compte de la Commission européenne.
« ELENA apporte le petit plus qui peut servir à mettre des projets énergétiques sur les rails, mêmes dans les logements privés », explique Louise White.
Coup de pouce financier à l’efficacité énergétique
Par le passé, ELENA a aidé de nombreuses collectivités locales et régionales à rénover des structures publiques. Grâce aux nouvelles ressources mises à disposition, ELENA appuiera les banques, les agences de promotion immobilière, les syndicats de copropriété, les agences énergétiques et d'autres organismes gérant des projets liés au logement.
Le programme du comté de Tipperary est un bon exemple de projet résidentiel qui pourra être reproduit ailleurs grâce aux nouvelles ressources mises à disposition par ELENA. L’Irlande connaît un énorme besoin en matière de rénovation énergétique de logements. Partout dans le pays, de nombreux logements anciens sont mal isolés ou chauffés au moyen de foyers ouverts ou de poêles fonctionnant au charbon et au bois. Aileen McCarthy explique que la plupart de leurs voisins à Cullen se chauffent au moyen d’une cheminée ouverte alimentée au charbon.
« Nous procédons de plus en plus à des rénovations en profondeur de logements », dit Paul Kenny, directeur général de l’Agence pour l'énergie du comté de Tipperary. « En remplaçant les cheminées et les poêles fonctionnant aux combustibles solides et en supprimant ces combustibles, les travaux réalisés améliorent grandement la qualité de l’air. »
La maison des McCarthy a été transformée en ce que Paul Kenny appelle un « superlogement ». Les logements de ce type présentent les caractéristiques suivantes :
- bonne isolation et fenêtres épaisses
- ventilation de pointe
- pas de foyers ouverts
- production de chaleur et d’eau chaude grâce à des énergies renouvelables, notamment par recours à des panneaux solaires ou à des pompes à chaleur
Depuis les travaux de rénovation, les économies d'énergie des McCarthy se chiffrent à environ 175 EUR par mois. Aileen McCarthy est également moins souvent malade.
« L’an dernier, à la même époque, j’étais à l’hôpital pour soigner une infection pulmonaire », confie-t-elle. « Mon état de santé était si mauvais que je pouvais à peine sortir de ma chambre sans mon masque à oxygène. Maintenant, je n’en ai plus autant besoin et je ne vais plus aussi souvent chez le médecin. »